Pour vous développer, vous allez devoir tôt ou tard embaucher un directeur de filiale ou un commercial. Si vous embauchez un Allemand, a priori plus à l’aise sur le
marché outre-Rhin qu’un Français, il faut veiller à respecter quelques différences.
Nous l’avons déjà évoqué, la concurrence est rude sur le marché des commerciaux en Allemagne. Les candidats, surtout s’ils sont ingénieurs, experts d’un secteur avec carnet d’adresses, n’ont que l’embarras du choix. Ils seront peut-être tentés de privilégier un employeur allemand. Pour les convaincre, il est souvent judicieux de s’adresser à un cabinet de recrutement qui saura jouer l’interface entre deux cultures de travail différentes. De façon générale, voici quelques principes simples que vous devez observer :
Assurez-le que votre entreprise ne va pas fermer boutique demain. Insistez sur l’historique de la maison mère, son succès, l’intérêt du produit que vous allez lui confier. Donnez des chiffres : chiffre d’affaires, nombre de salariés, stratégie et objectifs de l’entreprise. Sachez qu’un candidat allemand sera souvent plus sensible à des arguments quantifiables qu’un Français, qui misera plutôt sur la relation humaine. Il attend que vous lui donniez une image valorisante de l’entreprise. Evitez de surcharger le descriptif du poste avec des qualificatifs comme il est souvent d’usage en France.
Une fois la confiance installée, jouez sur les atouts traditionnels de la France. Ceux-ci sont toujours très appréciés en Allemagne : son art culinaire, sa qualité de vie, son climat, la possibilité de vacances au ski ou à la mer, etc. Paris fait encore beaucoup rêver !
Un Allemand est habitué à un certain type d’entretien de recrutement. Son CV est en général très détaillé et renseigne son parcours quasiment depuis l’école primaire ! Mais surtout, il s’attend à devoir répondre à des questions précises sur son secteur, ses méthodes de travail et, surtout, ses performances commerciales. Si de votre côté, vous aimez jauger un candidat sur une appréciation humaine, « à l’émotion », vous risquez peut-être l’incompréhension réciproque, voire de laisser passer un excellent candidat. Prenez donc le temps d’interroger la personne sur son chiffre d’affaires et comment il a été réalisé plutôt que de lui poser des questions très originales auxquelles il ne s’attend pas. Vous mettrez votre candidat à l’aise et faciliterez la communication. Faites-vous conseiller par votre cabinet de recrutement.
Une fois l’entretien réalisé, ne laissez pas traîner une candidature, surtout si elle vous a plu.
Susanne Goniak, chargée de recrutement chez Eurojob-Consulting, témoigne :
« Souvent, le patron français, après un dîner de présentation qui s’est bien passé, dit : «Il faut que j’y réfléchisse !». Mais le candidat allemand n’a pas le temps ! Il a mené trois autres entretiens proches de chez lui et il a une proposition sous le nez quand le Français est encore en train de digérer son dessert ! L’entreprise française doit être réactive et concrète, dire précisément quand elle compte donner sa réponse. Le candidat allemand va être réservé si la réponse ne tombe pas comme prévu. »
Vous pouvez embaucher un salarié même sans disposer d’une structure juridique
en Allemagne. Il faut néanmoins respecter certaines règles afin d’éviter la création
à votre insu d’une entreprise de fait (« établissement stable »), qui amènerait le fisc allemand à vous imposer en Allemagne. Si vous créez un emploi salarié de droit allemand dans votre filiale, vous serez surpris de constater que le droit du travail allemand est souvent plus souple que le droit français : la période d’essai est de six mois, un licenciement peut être prononcé par une petite entreprise (moins de 10 salariés) sans motif ni indemnité de rupture, les charges patronales sont beaucoup moins élevées. En revanche, l’impôt sur le revenu, retenu à la source, est beaucoup plus important en Allemagne qu’en France.
Pour tous les détails juridiques concernant le contrat de travail allemand,
consultez notre fiche technique dédiée.
C’est souvent la plus grosse source d’incompréhension entre l’entreprise et le candidat ou le recruteur. Le brut et le net ne se calculent pas du tout de la même manière de part et d’autre du Rhin. Gardez à l’esprit que les impôts en Allemagne se prélèvent à la source, que l’assurance maladie et invalidité est payée à part égale entre l’entreprise et le salarié.
Selon la situation familiale, l’appartenance à une église, la région d’implantation, les différences peuvent être importantes, prenez toujours soin de faire le calcul brut-net pour avoir en tête le net que va percevoir votre salarié.
« Souvent, les entreprises s’imaginent payer un salaire monstrueux et ne se rendent pas compte que le net est beaucoup moins élevé qu’elles ne l’avaient imaginé », ajoute Susanne Goniak, recruteuse. « Il faut veiller à ce que le budget salaire soit suffisant, au risque de ne pas trouver le candidat désiré ».
Un salaire brut de commercial allemand va varier entre 40 000 et 85 000 euros par
an, selon l’expérience. En dessous, vous risquez de recruter une personne qui ne
vous apportera pas satisfaction… voire sera à l’origine de graves déconvenues
sur le marché allemand.
Contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays, un commercial allemand sera réticent à accepter une part trop grande de sa rémunération sous forme de commission. La part variable du salaire s’élève en général à 10%, jamais au dessus de 20%.
Thomas Desray, conseiller financier pour les particuliers et les PME en Allemagne,
identifie trois niveaux de rémunération conseillés selon les postes et vous indique le coût pour votre entreprise :
36 000 euros brut par an. C’est le salaire d’un commercial terrain débutant. Un jeune avec un niveau bac+3, bac+4. Il est en déplacement du lundi au jeudi et travaille au bureau le vendredi.
Coût à prévoir pour l’entreprise (charges incluses) : 43 000 euros.
46 000 euros brut par an. C’est le salaire d’un commercial ayant déjà deux ans de VIE
derrière lui. Il connaît bien le pays et son marché et a des clients répartis sur toute l’Allemagne. Il a des responsabilités. C’est l’interlocuteur Allemagne de son entreprise pour une gamme de produits.
Coût à prévoir pour l’entreprise (charges incluses) : 55 000 euros.
80 000-85 000 euros brut par an. C’est le salaire d’un technico-commercial avec
10 ans d’expérience, très autonome. Il maîtrise les aspects techniques aussi bien que commerciaux.
Coût à prévoir pour l’entreprise (charges incluses) : 97 000 euros.
Pour calculer le net pour votre salarié, faites-vous conseiller par votre agent
de recrutement ou reportez vous au chapitre 6.
C’est bien connu : les Allemands vouent un culte à l’automobile. La voiture de fonction pour votre commercial est donc non seulement un avantage en nature essentiel pour motiver un candidat allemand mais aussi un signal que vous envoyez à vos prospects.
Malheureusement pour l’industrie automobile française, mieux vaut ne pas faire rouler votre commercial en Renault Clio ! Les représentations classiques sont très dominantes : comme le dit le slogan, outre-Rhin, Das Auto est souvent une Volkswagen. Sur le modèle, il faut prévoir un véhicule confortable et sûr, où le commercial ait la place de ranger sa mallette et éventuellement des échantillons plus ou moins volumineux. «Le véhicule le plus adapté est la Passat », recommande un recruteur. L’Audi A4 est également un modèle plébiscité par les commerciaux. Bien sûr, si vous en avez les moyens, votre commercial ne crachera pas sur une berline plus luxueuse. Mais là aussi, prenez garde à votre image. Dans certains secteurs il peut être mal venu de chercher à en mettre plein la vue à son prospect…
Thomas Desray le confirme : « La voiture de fonction est un avantage en nature indiscutable pour un candidat. Elle représente un substitut qui permet à l’entreprise de faire une vraie économie sur le salaire ». A titre d’exemple, au lieu de proposer à un candidat un brut à 47 000 euros par an, l’entreprise peut proposer 40 000 euros + voiture. Au pays de l’automobile, la voiture de fonction jouit d’un statut fiscal particulièrement avantageux pour les entreprises, si bien que 30% du parc automobile allemand est aujourd’hui constitué de véhicules d’entreprise ! Renseignez-vous précisément là-dessus auprès de votre conseiller fiscal, vous ferez ainsi des économies. La carte essence est également appréciée, une dépense qui passera dans les charges de votre entreprise.
Les autres avantages en nature classiquement proposés dans les entreprises sont les compléments d’assurance retraite et santé. Mais ils risquent de peser moins dans la balance au moment de l’entretien d’embauche.
Thomas Desray, conseiller financier :
« Le plus important, c’est la hauteur du salaire brut. Une entreprise qui donne
l’impression de trop recourir aux avantages en nature ne rassure pas. Des compléments d’assurance ou de retraite n’ont un intérêt réel que lorsque le salarié reste longtemps dans l’entreprise, ce qui n’est pas toujours le cas d’un commercial. »
Difficile d’assurer un bon équilibre entre une maison mère et sa filiale quand elles
sont de deux nationalités différentes. Lorsque votre filiale prend son envol et
qu’elle emploie plusieurs commerciaux plus un(e) secrétaire sédentaire, la question
du directeur de filiale est cruciale. A ce stade, la psychologie et le tact vont
jouer un rôle aussi important que les performances commerciales ou les connaissances techniques.
Susanne Goniak, chargée de recrutement :
« Le bon directeur de filiale est déjà bilingue, il a une expérience professionnelle dans les deux pays et comprend les besoins interculturels de part et d’autre. L’important est de savoir véhiculer ce qui vient de la maison mère à l’équipe de l’autre pays. La personne doit savoir faire preuve de pédagogie pour expliquer le pourquoi et le comment des différences culturelles et de la spécificité de la situation. »
Même avec un bon directeur commercial, il convient de vous intéresser à la psychologie générale du pays et aux différences culturelles avec la France. Vous éviterez ainsi de vous enfermer dans une attitude de jugement ou d’incompréhension, et serez mieux à même d’anticiper les attentes de vos salariés, prospects ou clients, ce qui est, à terme, le gage de votre réussite.
Jochen Peter Breuer et Pierre de Bartha sont deux experts des cultures française et allemande. Dans leur ouvrage, Deutsch- französische Geschäftsbeziehungen erfolgreich managen (Le management efficace des relations d’affaires franco allemandes, éditions Springer Gabler, non traduit), ils identifient les ressorts de la motivation de part et d’autre du Rhin. Nous reproduisons ici leur tableau sur les valeurs fondamentales françaises et allemandes traduites par nos soins.
des Français | des Allemands |
---|---|
Pouvoir | Argent |
Originalité | Utilité/rentabilité |
Défi | Sécurité |
Admiration | Reconnaissance |
Liberté | Égalité |
Fonctionnalité | Perfection |
Changement | Stabilité/continuité |
Plaisir | Temps libre |
Cécile Boutelet est journaliste freelance. Spécialiste de l’économie et des entreprises allemandes, elle est notamment correspondante pour le journal Le Monde. Sollicitée pour réaliser cet ouvrage, elle y a trouvé grand intérêt : elle-même a consacré ses premières années outre-Rhin à créer et développer une petite entreprise.
Illustrations : Katharina Bußhoff. www.katharinabusshoff.de
Vous remarquerez de profondes différences entre les deux colonnes : à chaque valeur fondamentale française correspond peu ou prou son opposé côté allemand ! Cela ne doit pas vous affoler ni vous décourager. Toutes ces valeurs doivent se manier avec précaution, en évitant les généralisations abusives. Elles se comprennent comme des clés de décodage d’une culture d’affaires dans son ensemble. Tout l’enjeu est de replacer les réactions de votre interlocuteur (et les vôtres par la même occasion !) dans leur contexte culturel, ce qui vous permettra de ne pas juger une réaction de façon erronée, ni de vous sentir offensé. Si vous comprenez votre interlocuteur et regardez ses réactions avec bienveillance, vous avez toutes les chances d’en faire un partenaire d’affaires à long terme !
C’est la base de l’interculturalité pour laquelle il existe de nombreux ouvrages et séminaires que nous ne saurions trop vous recommander. Les courts éléments qui suivent ne prétendent en aucun cas les remplacer.
Un Allemand a en général une vision des choses plus pragmatique que le Français. On parle souvent de l’antagonisme raison émotion. Là où un Français sera plus sensible à l’aspect émotionnel des choses, sera enthousiasmé par une idée brillante et originale et prêt à tout renverser pour la réaliser, un Allemand s’intéressera aux chiffres, à la réalité vraie et dure, qu’il aime vérifier par lui-même et sur laquelle il construira ses projets à long terme. Comme le soulignent les auteurs de l’ouvrage cité : un projet présenté par un Allemand selon ses valeurs paraîtra souvent au Français « soporifique ou peu inspiré », un projet présenté par un Français selon ses valeurs sera jugé « pas sérieux » par l’Allemand ! De cette différence fondamentale découlent beaucoup de différences franco-allemandes.
Vu de France, les grands managers allemands ont des CV qui peuvent paraître manquer de panache. Pas de « grandes écoles », des diplômes d’universités le plus souvent inconnues du grand public, une carrière ayant suivi patiemment tous les échelons à l’intérieur de l’entreprise. C’est le cas par exemple du PDG de Siemens, Joe Kaeser, ou de celui d’Audi, Rupert Stadler. Le culte du pouvoir et de l’influence, si valorisé en France, est vu en Allemagne avec suspicion, de même que le mot « élite ».
L’argent et le confort qu’il procure sont en revanche moins tabous en Allemagne qu’en France, ce sont des éléments concrets de réussite, en parler n’a rien de vulgaire ou de déplacé. Là où un Français évaluera sa carrière au pouvoir et aux responsabilités qu’il exerce, un Allemand sera très sensible au niveau de son salaire, élément quantifiable comme contrepartie de son travail. Dans vos relations avec vos salariés allemands, prenez soin de parler ouvertement et simplement de ce sujet. De même, le contrôle des coûts, le rapport qualité/prix sont des éléments prioritaires dans la conscience des Allemands. Un Allemand aura besoin d’un argument concret et quantifiable pour justifier rationnellement un achat « plaisir » ou « prestige ».
C’est un cliché des relations franco-allemandes. Un président français, désireux de redonner du panache à une relation jugée endormie, propose à son ou sa partenaire allemand(e) un projet original, susceptible d’enthousiasmer la presse française en flattant la fierté nationale. Dernier exemple en date : l’ambition de « créer un Airbus de l’énergie ». Aucune préparation commune préalable, pas d’étude chiffrée, pas de détail concret sur la mise en place d’un tel projet… Interrogé, le partenaire allemand se montrera poliment « ouvert à tout ce qui peut renforcer l’amitié franco-allemande ». Mais au fond il jugera que la proposition est sortie d’un chapeau et manque de sérieux !
Un Allemand juge la qualité d’un projet à la précision de sa préparation… au risque de paraître rabat-joie et sceptique. Plutôt que de s’enthousiasmer pour la nouveauté, il pose toujours la question : « Qu’est-ce que cela va nous apporter ? Est-ce finançable ? » Votre employé allemand vivra mal que vous renversiez une planification établie depuis longtemps pour imposer une nouvelle idée qui semble peu préparée. Même chose en réunion : vous déstabiliserez vos interlocuteurs si vous ne vous en tenez pas à l’ordre du jour établi en amont.
Ces deux valeurs contraires découlent des deux précédentes. Gardez en tête qu’un Allemand a une inclinaison naturelle pour la sécurité, ce qui le conduit à évaluer soigneusement tous les risques avant de s’engager. Cela explique la fameuse « lenteur » allemande dans la prise de décision… mais aussi leur fidélité à un fournisseur qui aura fait ses preuves ! Les Allemands sont ainsi les champions de la consommation d’assurances.
Autre exemple concret illustrant cette frilosité à la prise de risque : le CV. Une candidature allemande est un véritable dossier ! Vous y trouverez consignées toutes les copies des diplômes, les appréciations des employeurs précédents, toutes les preuves des éléments avancés dans le CV proprement dit, qui peut faire plusieurs pages. Là où le défi a tendance à motiver les Français, il effraie les Allemands qui préfèrent maîtriser 100% des éléments d’un projet. Zuverlässig (fiable) est une des qualités les plus prisées chez un manager ou un salarié allemand.
Conséquence logique d’un système d’éducation élitiste, où les premiers de classe sont félicités par les enseignants, les Français aiment se comparer et célébrer leurs performances, montrer qu’ils font mieux que les autres. Quitte à s’attirer les quolibets des autres pays qui jugent les Français arrogants. L’expression « la Grande Nation », qu’on retrouve en français dans la presse allemande, est un surnom mi-moqueur, mi-affectueux accordé à la France. Les Allemands, éduqués dans un esprit plus collaboratif, accordent davantage de crédit à la reconnaissance des performances du groupe. C’est la base du fameux consensus, qui règle en Allemagne les rapports entre les partis politiques, ou entre les partenaires sociaux.
Si chacun est prêt à reconnaître sa valeur à l’autre, on parvient à trouver un accord et un rapport gagnant-gagnant. Au niveau individuel, l’Allemand accorde beaucoup d’importance à la nécessité de « remplir son devoir », le respect d’une règle est une obligation morale forte. Il est ainsi beaucoup moins friand de félicitations que le Français. « En Allemagne, l’absence de critique est un compliment ! En France, l’absence de compliment est une critique ! » expliquent Jochen Peter Breuer et Pierre de Bartha dans leur ouvrage.
C’est un autre exemple classique : vous vous trouvez à un passage piétons, le feu est rouge. Aucune voiture en vue, vous traversez. Manque de chance : un père avec son enfant vous a vu et vous réprimande sévèrement pour votre manque de civisme. Vous n’avez pas respecté la règle qui vaut pour tous, vous montrez le mauvais exemple. En bon Français, vous prenez des libertés avec les règles qui ne peuvent empiéter sur votre capacité de décision à agir selon les opportunités qui se présentent. Les Allemands ne comprennent pas cet état d’esprit. La règle, surtout écrite, est sacrée. Pour un Allemand, elle est garante de l’égalité. Vous comprenez leur obsession du respect de la lettre des traités européens… alors que les Français jugent souvent que les règles ne sont que des recommandations.
Cela vaut de façon générale pour ce qui a été décidé par le groupe. Il est mal vu qu’une résolution prise en consensus avec une équipe soit subitement remise en cause par un chef « inspiré »… Prenez le temps de discuter avec vos salariés allemands de votre stratégie et assurez-vous qu’ils l’acceptent. Le culte de l’égalité en Allemagne passe aussi par la valorisation de la modestie, même dans le haut management. Rester « terre à terre » (bodenständig) et accessible quand on est patron est vu avec sympathie par les salariés.
Quel est le secret de la légendaire qualité allemande ? Ils passent leur temps à améliorer leurs produits existants. Quand un Français se satisfera d’un résultat « globalement satisfaisant » (l’important est que « ça marche »), un Allemand révisera son produit sous toutes les coutures, le bricolera, l’améliorera pour se rapprocher le plus possible de la perfection. Cette passion allemande du détail et de la perfection peut crisper les partenaires français. « Les Allemands font tout aussi bien que possible, les Français aussi bien que nécessaire ! », rappellent les auteurs de l’ouvrage cité. Esthétiquement, ce culte de la perfection passe souvent par des produits qui donnent l’impression d’être « solides » et « durables ». Pensez-y dans la détermination de votre catalogue pour l’Allemagne.
Les Allemands sont toujours surpris d’observer l’appétit de nouveauté des Français. En politique, un ministre allemand aura souvent affaire à deux à trois interlocuteurs différents au cours d’une même législature. Les noms des partis français changent régulièrement… outre-Rhin, le parti social-démocrate (SPD) a fêté en 2023 ses 160 ans ! C’est la même chose en affaires. Les changements intempestifs d’interlocuteur seront vus avec suspicion par vos clients, vos prospects, mais aussi votre filiale en Allemagne. Là où vos équipes françaises seront motivées par un bouleversement du management, il risque plutôt de déstabiliser vos salariés allemands, surtout s’il n’est pas bien expliqué. Là encore, il peut donner une image de manque de sérieux. Faire les choses jusqu’au bout, être « conséquent » est une qualité très appréciée des Allemands.
Le cliché veut que l’Allemand manque d’humour et aime le travail au point de ne pas savoir se faire plaisir. C’est une vision largement fausse : essayez donc de joindre un interlocuteur allemand en entreprise le vendredi après 15h30… Les Allemands accordent beaucoup d’importance à leur temps libre, en dehors des heures de bureau ! Ils rechignent à travailler le soir et le week-end, à sacrifier leur vie de famille, quand le Français se montrera relativement conciliant pour venir au bureau les samedis si l’entreprise est « charrette ».
De même, ils mettent moins de « passion » dans leur travail, ce qui peut paraître
ennuyeux à un Français mais qui permet de régler plus facilement les conflits. Il
faut cependant rester vigilant : de plus en plus de jeunes Allemands s’investissent
davantage personnellement dans leur entreprise et revendiquent aujourd’hui l’autonomie, la créativité et le plaisir au travail. Les valeurs « françaises » seraient-elles désormais en vogue en Allemagne ? Dans le doute, vous pouvez sûrement glisser ces mots dans vos entretiens de recrutement.